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Microsoft débranche son navigateur Internet Explorer 11 le 15 juin 2022

Lent, peu sécurisé, délaissé par les utilisateurs et ses créateurs eux-mêmes, le désuet navigateur Internet Explorer (IE) va être abandonné par Microsoft.

L’heure de la retraite pour cet outil devenu objet de railleries a été fixée au 15 juin 2022.

Planning annoncé par Microsoft:

  • Le 19 mai 2021 : annonce du retrait de l’application Internet Explorer 11.
  • Le 17 août 2021 : fin du support de IE11 pour Microsoft 365 et d’autres apps.
  • Le 15 juin 2022 : l’application Internet Explorer 11 sera définitivement retirée.

A cette date, le géant américain cessera de l’intégrer sur ses versions de Windows 10 et plus aucun support technique ne sera assuré.

Dès cet été 2021, il ne sera plus compatible avec la suite d’applications Microsoft 365.

Internet Explorer, lancé en août 1995, sera toujours accessible dans de très rares versions destinées aux entreprises qui utilisent encore des applications conçues pour ce navigateur, comme ActiveX.

Mais Microsoft invite ses derniers utilisateurs à tourner la page et à se tourner vers son remplaçant : Edge.

« L’avenir d’Internet Explorer sous Windows 10 est dans Microsoft Edge. Non seulement Microsoft Edge est une expérience de navigation plus rapide, plus sécurisée et plus moderne qu’Internet Explorer », vante Sean Lyndersay, l’un des responsables du programme, dans un billet de blog publié mercredi.

« Mais il est également en mesure de répondre à une préoccupation clé : la compatibilité avec les sites Web et les applications anciennes », poursuit-il, grâce à un « mode IE », ultime vestige du navigateur si décrié qui a accompagné les tout débuts de l’Internet grand public il y a 25 ans.

Celui-ci sera conservé pour des raisons techniques jusqu’en 2029, véritable date de la mise à mort complète d’Internet Explorer, dont la très lente disparition s’explique d’abord par l’entendue de sa domination sur le monde des navigateurs à une époque pas si lointaine.

Porté par Windows

Lancé en août 1995 sur les bases de l’un des premiers navigateurs, NCSA Mosaic, Internet Explorer concurrence immédiatement le leader Netscape.

Son succès ne tarde pas et s’explique en partie par le basculement du web vers une utilisation grand public. À la même période naissent les premiers moteurs de recherche comme Altavista et Lycos, les sites marchands Ebay et Amazon, ou encore le célèbre portail Yahoo!.

Explorer se pose en porte d’entrée idéale vers ce nouveau monde. Avant d’être très rapidement porté par le succès des logiciels de sa maison-mère.

En 1998, Internet Explorer atteint 40% de part de marché grâce à l’intégration native du navigateur dans les systèmes Windows qui inondent le monde entier. Une pratique qui coûte à la société de Bill Gates un très médiatique procès pour abus de position dominante, aux États-Unis. En 2004, Netscape remet le couvert pour les mêmes raisons et incite Microsoft à verser 750 millions de dollars pour cesser les poursuites.

L’Union européenne condamnera bien plus tardivement à plusieurs centaines de millions d’euros la compagnie pour cette pratique jugée anticoncurrentielle. Ce qui n’empêche pas Internet Explorer de représenter jusqu’à 95% de part de marché chez les navigateurs en 2004, et plus de 90% sur toute la période 2000-2005. Son apogée.

Failles de sécurité béantes

La chute est tout aussi rapide.

La concurrence, incarnée par Mozilla Firefox, lancé par la fondation éponyme en 2003, puis le navigateur de Google (Chrome) cinq ans plus tard, grignote en moins de dix ans l’avance d’Internet Explorer.

Le basculement s’opère en 2012.

Aujourd’hui, le site Statcounter estime à seulement 0,71% la part d’Internet Explorer dans le marché des navigateurs dans le monde, derrière son discret remplaçant Edge (3,39%) élaboré il y a cinq ans, très loin de Safari (16%), et surtout Chrome (64,71%).

Les raisons de ce retournement de situation si rapide sont nombreuses.

Bien que Windows représente toujours aujourd’hui sept systèmes d’exploitations sur dix installés sur des ordinateurs de bureau, son navigateur phare a tout simplement été délaissé, voire carrément ringardisé par la souplesse et la vitesse de Chrome, ou les garanties sécuritaires de Mozilla Firefox et la possibilité d’ajouter des fameux addons (extensions).

Les développeurs de sites Internet ont été les premiers à bouder le rigide et instable IE.

« ‘Je veux que le site prenne en charge IE6’ était un excellent moyen de faire pleurer un développeur adulte », écrivait un utilisateur sur le forum Reddit, il y a quelques années, dans une conversation dédiée à la « haine » que peut susciter Internet Explorer dans cette communauté. Pas la première du genre.

Les innombrables failles de sécurité recensées dès les premières versions du navigateur et la lenteur avec laquelle Microsoft déploie ses correctifs ont par la suite entaché sa réputation auprès du grand public et des États.

En 2004, la sixième version de IE est déconseillée d’utilisation par le gouvernement américain et sa cellule spécialisée en cybersécurité, le CERT.

La version 7 ne sera pas couronnée de plus de succès, étant utilisée pour un piratage massif contre Google, et condamnée cette fois par les gouvernements allemands et français.

Le lancement de Edge, en 2015, marque l’abandon progressif du navigateur par Microsoft lui-même. Les mises à jour de sécurité pour les versions antérieures à Internet Explorer 11 cessent l’année suivante.

Il y a trois ans, un responsable en cybersécurité de la compagnie, Chris Jackson, expliquait pourquoi il est dangereux d’utiliser Internet Explorer comme navigateur par défaut, puisque celui-ci n’était plus mis à jour de manière régulière.

« Nous ne prenons pas en charge les nouvelles normes Web pour cela et, bien que de nombreux sites fonctionnent bien, les développeurs dans l’ensemble ne les testent tout simplement plus sur Internet Explorer de nos jours », précisait-il.

Comme Adobe et son outil Flash, stoppé en décembre 2020, Microsoft est désormais obligé de condamner son navigateur encore sous les radars d’une poignée de pirates.

Un mal pour un bien.
Sa fin ne laissera personne nostalgique.

Voir le communiqué Microsoft (anglais)

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